Six Doors

Six Doors
Sophia Al-Maria, Cheryl Donegan, Sabrina Röthlisberger, Johanna Bruckner, Bek Hyunjin, Shadi Habib Allah

Une proposition de Francesco Urbano Ragazzi

Le Centre d’Art Contemporain Genève est fier d’ouvrir les portes de son 5e étage, une nouvelle couche, ou plus précisément, un nouvel espace de l’institution dédiée à la présentation d’art en ligne.

Mais à quoi devraient ressembler les portes d’un tel espace ? Devrait-il s’agir de portes, de portails, de retables ou d’autre chose ? Le duo de conservateurs Francesco Urbano Ragazzi, invité par le Centre, a commandé des pièces qui explorent la matérialité des images en à six artistes, afin de tenter de répondre à cette question. Telles des portes tambours, les œuvres de Sophia Al-Maria, Cheryl Donegan, Sabrina Röthlisberger, Johanna Bruckner, Bek Hyunjin et Shadi Habib Allah seront diffusées chaque mois sur le site du Centre d’Art Contemporain Genève. Le public découvre ainsi six vidéos et une certaine culture de l’actualité de la production en image en mouvement.

De nos jours, les images peuvent être assimilées à des portes. Nous pouvons le remarquer par l’inversion des proportions, du 16:9 au 9:16, format d’image actuellement le plus répandu sur les réseaux sociaux. Il s’agit d’une réorientation fondamentale, si ce n’est une révolution dans la manière de regarder. Pourtant, la verticalité n’est pas nouvelle dans l’histoire du cinéma. Depuis ses origines, la verticalité a inspiré de nombreux auteurs, théories et œuvres d’art : du collotype animé Boys Playing Leapfrog d’Eadweard Muybridge à la Symphonie Diagonale de Viking Eggeling, de l’argument de Sergej Ėjzenštejn contre la standardisation du format des écrans à celui de la poésie que Maya Deren définit comme une opposition à l’approche horizontale, plus classique, du théâtre. Ce qui semble nouveau, c’est que le spectateur est de plus en plus souvent et constamment invité à traverser ces images-portes. Les partis populistes attirent la population dans leur farce infinie de propagande par ces ouvertures étroite ; les influenceurs la poussent à suivre leur style de vie sponsorisé, et ainsi de suite, au moins jusqu’à ce que la réalité s’impose à nouveau de façon tragique, comme ce fut le cas lors de la diffusion en live de l’attentat d’Alton Sterling en 2016.

Afin d’entrer sérieusement dans ces images au lieu de se tenir désarmé sur leurs seuils, un activisme visuel est nécessaire. Les artistes qui ont participé à ce projet explorent plusieurs stratégies possibles. Certains nous poussent à développer une écologie visuelle, en travaillant sur la recirculation de matériaux en ligne obsolètes ; d’autres nous invitent à trouver une nouvelle perspective sur une nature hybride, faite de portraits et de paysages. Tout en allant à l’encontre de la vision panoramique humaine, certaines œuvres d’art suggèrent la vision du monde par les machines, et d’autres enfin nous aident à envisager les conditions nécessaires à l’apparition de nouvelles formes d’intimité, de générosité et de communauté. Souvent conçues à l’aide de portables, ces vidéos verticales peuvent aller à la racine d’un geste créatif qui nous mène quelque part entre les plantes en croissance et les pages écrites, la caméra et l’écran, le cinquième étage et ses six portes.

Porte 1
Sophia Al Maria, Mirror Cookie, 2018
Courtesy de l’artiste, Anna Lena Films et Project Native Informant, Londres

Porte 2
Cheryl Donegan, Vines, 2016
Courtesy de l’artiste et levy.delval, Brussels, Belgium

Porte 3
Sabrina Röthlisberger, ADN, 2018
Courtesy de l’artiste
Une production du Centre d’Art Contemporain Genève

Porte 4
Johanna Bruckner, Molecular Ghosts of Love, 2019
Avec le soutien de Pro Helvetia

Porte 5
Bek Hyunjin, Wave, série vidéo (16 vidéos), 2019
Courtesy de l’artiste et PKM gallery, Séoul

Porte 6
Shadi
 Habib Allah, Trim, 2019
Sound design: Steffen Martin
Courtesy de l’artiste ; Rodeo gallery, Londres, Le Pirée ; Reena Spaulings Fine Art, New York et Green Art Gallery, Dubai.